Le succès au box-office d'”Oppenheimer”, bien que partiellement éclipsé par les triomphes spectaculaires de “Barbie” (Greta Gerwig, 2023), a clairement montré que le public était avide de replonger dans le récit épique de Christopher Nolan.
Avec la brillante cinématographie de Hoyte van Hoytema et la bande originale envoûtante de Ludwig Göransson, Nolan raconte la vie et l’œuvre de J. Robert Oppenheimer (New York, États-Unis, 1904), le génie qui passa à l’histoire comme le “père de la bombe atomique”. Physicien théoricien et professeur de physique à l’université de Californie, il dirigea le laboratoire national de Los Alamos, où fut mené le projet Manhattan aboutissant à la création des premières armes nucléaires.
Toutefois, malgré le courage du réalisateur d’oser désigner un nouveau suspect dans la mort de JFK dans “Oppenheimer”, les conséquences immédiates et sanglantes du triomphe de son protagoniste restent en retrait. Même si nous assistons à l’essai Trinity, la première explosion d’une arme nucléaire créée par les États-Unis, nous ne voyons pas les bombes qui ont tué.
Pour ce qui est des bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki, David Lynch les a peut-être mieux représentés que “Oppenheimer”, mais le film parvient à capturer l’obscurité de l’expérience juste avant qu’elle n’explose.
Le Japon sous la terreur du monstre
En effet, près de 70 000 personnes, soit 30 % de la population d’Hiroshima, ont été tuées sur le coup, tandis que 70 000 autres ont été blessées. La bombe Little Boy, larguée le 6 août 1945 sur Hiroshima, fit immédiatement grimper la température à plus d’un million de degrés Celsius, créant une boule de feu de plus de 270 mètres de diamètre. Trois jours plus tard, le 9 août 1945, la bombe Fat Man fut lâchée sur Nagasaki, tuant instantanément 40 000 autres personnes.
Les conséquences directes pour le protagoniste d'”Oppie”, interprété par Cillian Murphy, sont quelque peu occultées par un procès revanchard, laissant peu de place à une exploration plus approfondie de ses émotions.
Les bombardements atomiques et la capitulation du Japon plongèrent le peuple japonais dans une phase tragique et déprimée. Des films tels que “Les enfants d’Hiroshima” (Kaneto Shindô, 1952) ou “Hiroshima” (Hideo Sekigawa, 1953) commencèrent à aborder le sujet. C’est alors que le cinéma de science-fiction fit son apparition, avec “Le Japon sous la terreur du monstre” (Ishirô Honda, 1954) propulsant le mythe de Godzilla dans la culture mondiale.
Au fil des années, d’autres films tels que “Chronique d’un être vivant” (Akira Kurosawa, 1955), “Les enfants de Nagasaki” (Keisuke Kinoshita, 1983), “Black Rain” (Shôhei Imamura, 1989), “Rhapsodie en août” (Akira Kurosawa, 1991) et même “Akira” (Katsuhiro Ōtomo, 1988) ont permis de mieux comprendre comment le peuple japonais a tenté de panser ses plaies.
Première japonaise de “Oppenheimer”.
Le cinéma japonais, soucieux de guérir, n’a jamais hésité à aborder le sujet, soit à travers ses propres productions, soit en importants des visions étrangères sur ce qui s’était passé.
Toutefois, malgré ce besoin de guérison, “Oppenheimer” reste sans date de sortie au Japon, probablement en raison du conflit entre son récit et la mémoire des victimes et de leurs descendants. Les dernières productions telles que “Mission Impossible : Deadly Doom – Part 1” (Christopher McQuarrie, 2023), sortie le 21 juillet, et “Barbie” (Greta Gerwig, 2023), prévue pour le 1er août, ont déjà pris le pas sur ce titre.